L’offensive de Putine en Afrique


La tribune de Pierre Alain
Journaliste et chercheur indépendant vivant entre Brazza et Kinshasa

Moscou, on le sait, est au milieu d’une grande offensive militaire, diplomatique, politique et symbolique pour affirmer, ou réaffirmer, la Russie comme puissance d’envergure mondiale, après la déconfiture soviétique du début des années 1990. D’abord face à l’Ukraine et à l’Europe, bien sûr, mais pas seulement.

En Afrique, on tente de capitaliser sur le sentiment anti-occidental, avec le déploiement de réseaux mercenaires, principalement le fameux Groupe Wagner, formé au début des années 2010 autour d’ex-militaires russes à la retraite.
Après avoir fait ses premières armes dans le Donbass en Ukraine et en Syrie, il est ensuite intervenu en Libye, en Centrafrique, et plus récemment au Mali et au Burkina Faso. Avec des détachements allant de quelques centaines à 1000 ou 1500 hommes. Officiellement non lié au Kremlin, ce groupe paramilitaire est en fait financé par le milliardaire Evgueni Prigojine, un ami proche de Vladimir Poutine.

Amnistie internationale et Human Rights Watch ont écrit que le Groupe Wagner s’est rendu coupable de violences contre des civils et de pillages des ressources minières, notamment en Centrafrique. À Bamako, et peut-être bientôt à Ouagadougou, le sentiment antifrançais semble susciter un rapprochement des nouvelles autorités militaires avec les Russes.
Il est très douteux que quelques centaines de paramilitaires russes puissent aller faire le travail contre Al-Qaïda et l’État islamique au Sahel, là où des milliers de militaires professionnels français auraient échoué.

Telle est pourtant une croyance de plus en plus répandue dans ces deux capitales, où la rhétorique anticolonialiste des nouveaux dirigeants putschistes – et d’une partie de la population qui les appuie – vise les Européens, mais pas les Russes, vus par certains comme les nouveaux sauveurs.