Pêcher dans la mangrove du fleuve Congo


Des dizaines de têtes sortent de l’eau, à bout de souffle, inspirent bruyamment et replongent. Chaque jour, des pêcheurs, hommes et femmes, fouillent la vase à mains nues, en apnée sous plusieurs mètres d’une eau marronnasse à l’embouchure du fleuve Congo, pour dénicher des “huîtres d’eau douce”, les Bibwati.
Ces huîtres, qu’ils récoltent depuis de lointaines années au fond du fleuve, sont la principale ressource des Assolongo, membres de la seule tribu autorisée à vivre dans la réserve naturelle du Parc marin des mangroves situées à 600 km au sud-ouest de Kinshasa.

Après avoir traversé d’est en ouest toute l’Afrique centrale sur près de 5.000 km, le fleuve Congo se jette dans l’océan Atlantique en ces lieux où la République démocratique du Congo a conservé moins de 40 kilomètres de côte, coincés entre deux territoires angolais.
A l’embouchure du fleuve, il faut naviguer dans un labyrinthe naturel de près de 20.000 hectares de forêts inondées pour atteindre le village de Nteva. “Ici, nous n’avons pas d’électricité, quasiment pas de réseau téléphonique, pas d’école non plus”, énumère Mbulu Nzabi, le chef du village.
Lui et ses administrés sont tous pêcheurs de bibwati. Contrairement au problème mondial d’érosion du littoral, eux gagnent chaque jour quelques millimètres de terre sur la mangrove en se débarrassant des coquilles, une fois vidées de leur chair.
“Nos grands-parents avaient construit leurs cases plusieurs dizaines de mètres en retrait de là où nous sommes aujourd’hui. Nous vivons sur un gros tas de coquilles de bibwati qui ne fait que grandir”.